Disons-le d’emblée : je suis rarement en accord avec
les opinions de Richard Martineau. Cette fois-ci ne fait pas exception. La
plupart des pédos sont des chefs scouts, vraiment? Y a-t-il vraiment lieu de se
demander, chaque fois qu’on voit un homme animer aux scouts, s’il est un pépère
pervers?
La chronique de Monsieur Martineau faisait référence, bien
entendu, à l’arrestation de treize hommes (dont deux étaient animateurs scouts)dans le cadre de l’opération Malaise, qui ciblait un club social de présumés pédophiles. Oui, oui, un club social d’hommes qui se rencontraient pour se
donner des trucs sur la meilleure façon d’approcher des enfants, s’échanger des
images de pornographie junévile, et je ne sais quoi d’autre encore que je n’ose
même pas imaginer.
C’est dégueulasse.
Un aller simple vers
une île déserte, svp!
Je siège sur le C.A. du groupe scout de ma ville. Mon mari
est animateur scout. Plusieurs de mes amis le sont aussi. Deux de mes enfants
sont scouts et les deux autres le seront sans doute dès qu’ils en auront l’âge.
Autant dire que le mouvement scout, je l’ai dans le cœur et je l’ai à cœur!
Malgré tout, à l’annonce de cette nouvelle dégoûtante, ce
n’est pas ma solidarité et mon amour du scoutisme qui est ressorti le premier.
C’est mon cœur de maman, mon désir de protéger mes enfants envers et contre
tous. Une boule d’inquiétude est apparue dans mon ventre, dans ma gorge.
J’avais l’impression d’être trahie, de ne plus pouvoir faire confiance à
personne.
Ce jour-là, lorsque les informations concernant cette vague
d’arrestations sont sorties, je n’avais qu’une envie : prendre mes enfants
tout contre moi et partir vivre sur une île déserte. Loin des menaces, loin de
la folie des hommes, loin des dangers.
Mais qui sont les
animateurs scouts?
Une fois la poussière un peu retombée, je me suis à peu près
remise de mes émotions. J’ai pensé à tous les animateurs scouts que je connais,
que j’aime et que j’apprécie. Je me suis rappelée pourquoi ils animaient.
Plusieurs ont été scouts eux-mêmes, alors qu’ils étaient
enfants. Mon mari fait partie de ces enfants qui ont pu grandir, s’épanouir et
se développer grâce au scoutisme. Leur sentiment d’appartenance au mouvement
est extrêmement puissant en raison de toutes les expériences formidables qu’il
leur a fait vivre. Passionnés, scouts jusqu’au plus profond de leur âme, ils
veulent maintenant transmettre aux enfants les valeurs qu’ils ont apprises. Ils
ont tant reçu du scoutisme qu’ils se font un point d’honneur de donner au
suivant.
D’autres sont devenus animateurs quand leurs enfants sont
entrés dans les scouts. Bien souvent, c’était une façon parfaite de faire une
activité avec leur progéniture et de partager des expériences extraordinaires
avec eux. La plupart se sont laissé prendre par la passion du scoutisme et
n’ont jamais cessé d’animer ou de s’impliquer au sein du mouvement, même une
fois leurs enfants rendus grands!
D’autres n’ont pas d’enfants, et n’ont pas été scouts lorsqu’ils
étaient enfants non plus. Ils sont là parce qu’ils ont le bien-être des jeunes
à cœur, leur instinct maternel ou paternel est souvent très fort, et ils veulent
contribuer à l’épanouissement des enfants qui leur sont confiés à titre d’animateur.
Parce que ça se peut, vous savez, aimer les enfants, purement et simplement.
Comment fait-on pour
devenir animateur?
Depuis le démantèlement du club social de présumés pédophiles,
j’en ai entendu des vertes et des pas mûres à propos des scouts. Certains
croient que n’importe qui peut devenir animateur n’importe comment. Qu’on entre
dans le mouvement scout aussi facilement que dans un moulin.
Mais bien sûr que non! Je serais la première à retirer mes
enfants du groupe scout si les procédures de recrutement n’étaient pas assez
strictes, croyez-moi. L’Association des scouts du Canada a un protocole officiel très rigoureux pour quiconque veut devenir animateur.
D’abord, sachez que les antécédents judiciaires de tous les
candidats sont vérifiés par les corps policiers. Ensuite, ils doivent passer
une entrevue avec des membres gestionnaires ou des animateurs chevronnés, et
donner des références qui seront scrupuleusement vérifiées.
Ensuite, ils sont soumis à une période de probation. Une
fois mis en contact avec les jeunes, et ceci est valable pour tous les
animateurs sans exception, ils doivent respecter un Code de conduite à la
lettre. De plus, notre groupe a comme règle d’or qu’un jeune ne doit jamais
être seul avec un animateur, en aucune circonstance. Cette règle vise à la fois
à protéger les enfants et les animateurs qui, malheureusement, pourraient aussi
être accusés à tort d’attouchements sexuels.
Les animateurs se doivent d’être toujours au-dessus de tout
soupçon, c’est primordial.
Pourrait-on faire
plus pour protéger les enfants?
Bouleversée par les événements, et probablement portée par
ma formation en travail social, j’ai tenté d’en savoir plus sur les agresseurs
sexuels. J’ai donc contacté une intervenante sociale oeuvrant auprès de
victimes d’agressions sexuelles pour lui poser des questions.
En tant que groupe scout, malgré toutes les procédures,
règles et codes de conduite que nous mettons en application, que peut-on faire
de plus pour nous assurer qu’aucun pédophile ne réussisse à s’infiltrer chez
nous? Y a-t-il des traits communs, des indices, des choses qui pourraient nous
mettre la puce à l’oreille pour les détecter?
La réponse de l’intervenante fut très claire : non. Les
pédophiles sont des êtres extrêmement manipulateurs, charmeurs et qui tentent
par tous les moyens d’atteindre leur but. Ils sont subtils, prennent leur temps
pour n’éveiller aucun soupçon et sont même généralement très appréciés des
jeunes autour d’eux.
Ils viennent de tous horizons, sont beaux ou laids, jeunes
ou vieux, pères ou célibataires. Les mesures de sécurité que nous avons mis en
place sont déjà très strictes et nous pouvons difficilement faire plus, sauf
rester vigilants et appliquer la politique de tolérance zéro envers tout
manquement au code d’éthique.
L’intervenante m’a aussi rappelé que personne, ni les
jeunes, ni les parents, ni les groupes scouts ne devait se sentir coupable de
la situation. Les seuls coupables, ce sont ces hommes qui ont mal agi, et
personne d’autre. Elle a bien raison.
Il ne suffit que
d’une pomme pourrie…
Au cours des derniers jours, je suis passée par toute la
gamme des émotions. J’ai été dégoûtée, scandalisée, effrayée, inquiète. Méfiante,
en colère. Puis, déterminée à défendre le mouvement scout et à être solidaire
envers tous les animateurs qui voyaient désormais leur passion transformée en
déviance dans l’œil public.
Ces hommes, accusés d’actes dégoûtants, ont terni l’image du
scoutisme. Ça me fâche et m’attriste à la fois.
Mais ce qui me blesse le plus, c’est de penser à mon mari et
mes amis animateurs scouts qui, parce qu’ils sont des hommes, sont désormais
regardés par certains avec méfiance. Des hommes qui aiment être avec des enfants?
Voilà qui, tout à coup, semble bien louche…
C’est d’une tristesse infinie. Il n’aura suffi que de
quelques individus déviants pour qu’on oublie que 99,9 % des animateurs
scouts se dévouent, cœurs et âmes, pour le bien-être des jeunes. C’est profondément
injuste.
Je les connais, moi, les animateurs. Je sais ce qui les
anime, Daniel, Alexandre, Francis, Jean-Philippe, Marc-André, Sébastien, Samuel,
Simon, François et tous les autres. Ce n’est pas une attirance scabreuse envers
les enfants. C’est un amour pur du scoutisme, une passion pour les valeurs que
voulait transmettre Baden-Powell et un plaisir honnête et sans aucune
arrière-pensée d’être avec des enfants.
Non, les animateurs scouts ne sont pas de sales pervers. De
sales pervers se sont infiltrés parmi les animateurs scouts. Toute la nuance
est là.