Grande M. a 11 ans, presque 12. Grand A. a 9 ans, presque
10.
Ils sont grands, mes enfants. Leurs intérêts changent, leurs
jeux aussi, et leurs relations avec leurs amis et le sexe opposé également.
Ils parlent de plus en plus d’amour, de bisous, de
menstruations, de seins qui poussent, de faire l’amour. Grande M. en parle de
façon plus sérieuse, avec moi ou ses amies. Grand A., lui, en parle en niaisant
ou en faisant le pitre. Chose certaine, ils parlent de sexualité tous les deux,
à leur manière, selon leur degré de maturité et les caractéristiques propres
aux garçons et aux filles de leur âge.
Ça fait un bout de temps que je me demande si je devrais
parler de sexualité avec mes deux grands, et si oui, quoi dire. Bien entendu,
ils connaissent depuis longtemps la mécanique, la biologie de la chose. Ils
savent comment on fait des bébés et je leur ai appris les vrais mots qui
représentent les parties génitales. Mais j’avais le sentiment que je devais
aborder le sujet à nouveau avec eux pour parler de contraception, d’ITSS, de
consentement, de plaisir et de respect, et de pornographie.
Quand j’ai demandé à Alexandre ce qu’il en pensait, il s’est
écrié : « Ben voyons, ils sont beaucoup trop jeunes! » Son air
de déni total face au fait que ses enfants grandissent m’a convaincue que c’était
bel et bien le temps d’avoir une petite conversation avec eux. Hihi!
Je me suis dit que c’était mieux de leur parler « des
vraies affaires » plus tôt que trop tard. Après tout, ma mère a
toujours été très ouverte avec nous à propos de sexualité et répondait très
adéquatement et sans aucune gêne ni tabou à nos questions sur le sujet. Par exemple, quand j’étais en 6e
année, deux garçons de ma classe m’ont demandé : « Sais-tu c’est
quoi, un condom? » Moi, qui pensais qu’ils parlaient d’un condo : « Ben
oui, ma grand-mère habite là-dedans! » Évidemment, j’ai fait rire de moi
pas à peu près!
De retour à la maison, ce soir-là, j’ai demandé à ma mère ce
qu’était un condom. Elle a répondu à ma question et a même sorti un condom, un
vrai, pour me montrer à quoi ça servait et à quoi ça ressemblait. Ce n’était
pas gênant du tout, c’était une explication simple et naturelle. Elle m’a aussi
dit qu’elle en garderait toujours dans l’armoire et que je ne devais pas me
gêner à en prendre si un jour j’en avais besoin. Bien entendu, j’étais bien
loin de même penser à avoir des relations sexuelles, à cet âge, mais ça m’a
permis de savoir que cette protection était importante et facilement disponible.
Et non, de savoir des choses sur la sexualité et la contraception ne m’ont pas
incitée à avoir des relations sexuelles plus tôt. Pas du tout. Ça m’a aidée par
contre, rendue à cette étape de ma vie, à comprendre comment ça fonctionnait et
à me protéger adéquatement.
Bref, c’est comme ça que je veux aborder la sexualité avec
mes enfants. Simplement, parce que ça fait partie de la vie, et ouvertement
pour que mes enfants ne soient pas gênés de me poser leurs questions. Assez
tôt, aussi, pour qu’ils apprennent ces choses de la bonne façon, avec les
bonnes informations et les bonnes valeurs, qui proviendront de moi, plutôt que
de leurs amis ou, pire encore, d’Internet.
Un soir, je suis donc allée jaser avec ma grande dans sa
chambre. Je me suis assise sur son lit et on a placoté. Au début, elle était
gênée, mais finalement, j’ai bien vu que je répondais à plusieurs questions qu’elle
se posait sans oser les demander. J’ai commencé par lui parler de prévention
des grossesses en lui parlant de la pilule et du condom. Puis, je lui ai
conseillé de toujours utiliser le condom de toute façon, même si elle prend un
jour la pilule, pour prévenir les ITSS. Ensuite, nous avons parlé de l’aspect
émotif et affectif des relations sexuelles. Je pense qu’on oublie souvent d’en
parler avec les jeunes. On parle de la « mécanique » et des maladies,
mais à la base, c’est un magnifique acte d’amour, de tendresse et de complicité
avec la personne qu’on aime, non? En tout cas, c’est ce que je veux que mes
enfants apprennent. Je lui ai dit que puisque c’est un acte d’amour et de
respect, jamais elle ne devait se sentir obligée de faire quoi que ce soit qui
lui déplairait. Rien n’est obligatoire, en matière de sexualité, absolument
rien. Et si son partenaire la force, lui met de la pression ou fait du chantage
pour lui faire faire des choses qu’elle ne veut pas faire, c’est qu’il ne l’aime
pas assez pour la respecter. Ma grande m’écoutait attentivement.
Je lui ai également parlé de pornographie. Nos enfants,
aujourd’hui, ont facilement accès à Internet et nous ne pouvons pas toujours
savoir ce qu’ils font sur le Web et surtout, ce qu’ils y voient. Si on peut
avoir un certain « contrôle » à la maison, il n’en va pas de même
lorsqu’ils vont jouer chez des amis ou lorsqu’ils regardent leur tablette
électronique bien tranquille dans leur chambre. Je ne veux pas surveiller tout
ce que mes enfants font ou restreindre leur accès au Web de façon arbitraire.
Mais je veux développer leur esprit critique et les inciter à être vigilants
lorsqu’ils naviguent sur la toile.
J’ai d’abord expliqué à ma grande fille ce qu’est la
pornographie, en lui mentionnant que ce n’était pas approprié pour les enfants.
Je lui ai expliqué que ces films ne représentent pas la réalité, que les
actrices font semblant et font des trucs que bien des femmes n’ont pas envie de
faire « dans la vraie vie ». Bref, si jamais elle est exposée à des images
pornographiques, je ne veux pas qu’elle pense que ce qu’elle verra représente
ce qu’est faire l’amour pour de vrai.
Elle m’a alors dit qu’une de ses amies lui avait déjà montré
des gens tout nus qui font l’amour sur sa tablette électronique, mais que ça l’avait
mise très mal à l’aise et qu’elle lui avait dit d’arrêter ça sur le champ. Je l’ai
félicitée de s’être écoutée et d’avoir respecté le sentiment de malaise qu’elle
avait ressenti. Je lui ai rappelé qu’il faut toujours écouter notre cœur et que
si on ne se sent pas bien dans une situation, c’est que ça ne nous convient
pas. Elle m’a aussi dit qu’une autre de ses amies avait vu des images
pornographiques sur l’ordinateur familial après que son beau-père l’ait
utilisé. Il n’avait visiblement pas bien fermé ses fenêtres de navigation… Ça m’a confortée encore plus dans mon opinion
que les enfants d’aujourd’hui seront inévitablement exposés à la pornographie,
un jour ou l’autre, bien souvent involontairement. Nous ne pouvons pas les
cloîtrer pour tenter de les soustraire à ces images, mais nous pouvons, en tant
que parents, faire de la prévention qui les aidera à réagir de la bonne façon s’ils
en voient…
J’ai terminé ma conversation avec ma grande en lui rappelant
que même si c’est parfois gênant d’en parler, je serais toujours disponible pour
répondre à ses questions.
Hier, j’ai décidé d’avoir le même genre de conversation avec
grand A. Disons que sa réaction n’a pas été du tout la même!
Moi : « Grand A., j’aimerais ça te parler de
sexualité »
A, horrifié : « Aaarrrkkk! »
Moi : « Ben voyons, c’est important! Pis c’est pas
dégueu, ça fait partie de la vie! »
A, dégoûté : « Maman, AAA-RRRR-KKK-EEE! »
Moi, crampée : « Ok, ok! Je veux juste savoir si
tu as déjà vu des images de monde tout nu sur le Web »
A, presque traumatisé : « Du monde tout nu?
AAAAAA-RRRRRR-KKKKK-EEEEE! »
Hihi! J’ai laissé faire, je pense qu’il n’est pas du tout
rendu là! Je me reprendrai plus tard, quand il sera plus réceptif.
Finalement, je suis allée jeter un coup d’œil dans l’historique
de navigation des iPod de chacun de mes enfants, juste pour voir. L’historique
de grande M. était vide, ce qui ne m’a pas surprise parce qu’elle utilise
principalement la messagerie texte et la musique, c’est tout. Rien à signaler
dans ses messages textes ni dans ses courriels non plus. L’historique de
navigation de grand A. était exclusivement constitué de superhéros et de vidéos
de dessins animés. Excellent!
Ma prochaine étape sera d’acheter un livre sur la sexualité,
probablement celui de Jocelyne Robert, que j’adore, qui s’adresse aux 9-12 ans,
et de le laisser trainer tout bonnement près des toilettes ou dans la
bibliothèque du salon. Comme ça, s’ils ont des interrogations ou sont curieux,
ils auront accès à une source fiable d’information sans avoir nécessairement à
me poser des questions. Je pense que ça complètera bien le tout pour l’instant…
J’espère avoir abordé le sujet de la sexualité avec enfants
de la bonne façon. Je pense bien que oui…
Et vous, comment avez-vous abordé le sujet avec les vôtres?
Comment vos parents vous avaient-ils parlé de tout ça?
C'est tellement l'attitude que tous les parents devraient avoir avec leurs enfants par rapport à la sexualité, je trouve. Ne pas être gêné d'en parler, dire les vraies choses et surtout ne fermer la porte à aucune question. Je ne me souviens pas exactement comment mes parents m'en ont parlé pour la première fois et je ne crois pas qu'il y avait de tabous, mais je n'en parlais pas des masses non plus. Ma mère m'avait acheté un livre sur la sexualité, par exemple, et je peux dire que ça a répondu à beaucoup de mes questions.
RépondreEffacerMoi aussi, j'avais plusieurs livres sur la sexualité, et j'aimais beaucoup m'y référer pour voir "si j'étais normale". J'en ai acheté deux que je laisse traîner dans le salon, j'imagine que mes enfants les consulteront quand ils en ressentiront le besoin :-)
EffacerWow! Tu as vraiment une bonne attitude et une approche ouverte et chaleureuse envers la sexualité. Exactement ce qu'il faut faire, doublement aujoud'hui avec tout ce qe l'on trouve facilement sur le net. Ma mère avait fait un peu la même chose pour moi et mon frère. Je me rappelle que nous lisions ensemble le soir le livre Ma sexualité de 9 à 12 ans. Je pouvais poser toutes les questions que je voulais. Elle était très ouverte. Et plus tard, lorsque j'ai eu mon premier vrai chum (à 16 ans), elle m'a elle-même demandée si je voulais prendre la pillule au cas où. Je lui en serai toujours reconnaissante de me l'avoir proposée parce que je ne suis pas certaine que j'aurais osé lui demander et c'est avec ce gars là que j'ai eu ma première relation sexuelle quelques mois plus tard. C'est certain qu'il y a eu certains petits accrochages lorsque j'étais ado (ma mère m'avait surprise à aller rejoindre mon chum alors que nous n'étions pas supposé dormir ensemble). Je me rappelle aussi qu'elle avait assez mal réagit lorsqu'elle avait trouvé mon premier 'string' dans le panier à linge! Ouf! Elle me l'avait presque lancé au visage en appelant cela "des petites culottes de danseuses"! Ca me fait rire maintenant mais à l'époque cela avait été toute une crise! Je crois que c'est peut-être une question de génération - Elle même n'avait jamais portée ce genre de culotte avant et je sais maintenant qu'elle en porte à l'occasion lorsqu'elle met un pantalon ou une jupe serrée pour ne pas que l'on voit les coutures. Je ne crois pas qu'elle réagirait de la même façon aujourd'hui. La porno, elle ne m'en avait pas vraiment parlé car ce n'était pas encore assez fréquent et disponible dans les années 90. Mon père lui, ne m'a jamais vraiment parlé de sexualité. Je crois que ca le rendait mal à l'aise.
RépondreEffacerAlexandre non plus, n'est pas très à l'aise de parler de sexualité avec les enfants. J'imagine que le lien de proximité affectif avec la maman favorise les sujets plus intimes... Ou l'éducation qu'on a reçue dans notre famille sur le sujet, peut-être? En tout cas, pour l'instant, ma fille est un vrai livre ouvert et j'espère que ça va continuer, mais je ne me fais pas d'illusions : un jour, elle deviendra plus discrète sur ses découvertes et ses sentiments. En autant qu'elle sache que je serai toujours là pour elle, c'est ce qui compte :-)
EffacerLa réaction spontanée de ton fils m'a fait rire! Tu l'as su clairement qu'il n'était pas prêt à aborder le sujet! Trop comique le petit. Ta fille est réceptive et tu as senti avec raison que, pour elle, c'était le temps. Bravo!
RépondreEffacerHihi! Il était vraiment très drôle, avec son air mi-scandalisé, mi-dégoûté! Je me reprendrai plus tard, quand il sera rendu là ;-)
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