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jeudi 10 juillet 2014

Les mères sont des « bitchs »



Chère Bianca,

J’ai lu avec émotion ce texte, sur ton blogue, dans lequel tu exprimes avec beaucoup de justesse ta frustration et ta déception face aux commentaires pleins de jugements que se font les mamans entre elles.

Tu as parfaitement raison : les mères sont des "bitchs".

Entre elles, bien sûr, comme tu l’as rapidement constaté depuis que tu es toi-même maman.

Mais surtout envers elles-mêmes. 

Nous vivons dans une ère où des tonnes de spécialistes ont décidé, du haut de leurs études universitaires supérieures (ou pas!), que nous, petites mamans ignares, ne savons pas nous occuper de nos bébés.

Ils nous inondent donc de leurs conseils et recommandations. Nous entourent de leurs soins avant même que nous n’ayons mis au monde ce petit être que nous fabriquons dans notre ventre.

Nous sommes une société en « overdose » de spécialistes en petite enfance et en maternité. Nous sommes, en tant que mamans, dépossédées de nos compétences et de notre instinct. Nous n’avons pas de diplôme, nous! Que vaut notre jugement?

Le pire, dans tout ça, c’est que les spécialistes et théories se contredisent. Ma première fille ne dormait JAMAIS. J’étais épuisée, découragée et désespérée de trouver une solution. Je suis allée à la bibliothèque chercher un livre, j’ai fait des recherches sur Internet, j’ai même appelé la clinique de sommeil de l’hôpital Sainte-Justine. Après toutes ces démarches, j’étais encore plus confuse qu’avant : tous ces soi-disant spécialistes se contredisaient les uns les autres!

L’un ne jurait que par la méthode de laisser pleurer (5-10-15), l’autre préconisait l’attachment parenting et le cododo. L’un prétendait que le bébé a besoin d’aide pour apprendre à dormir dès la naissance, l’autre de respecter le rythme du bébé et de ne pas s’attendre à ce qu’il fasse ses nuits avant x mois. Et bien entendu, toutes ces sources d’informations étaient fiables et ces méthodes avaient même fait l’objet d’études!

Complètement mêlée, j’ai appelé ma marraine d’allaitement, et c’est elle qui m’a aidée. Pourquoi? Parce qu’elle m’a écoutée, d’abord, et m’a ensuite dit de m’écouter, moi. Je suis tombée à la renverse de surprise : je peux m’écouter? Je peux faire comme je veux? Mais que vont dire les autres? Et le pédiatre? Ils savent mieux que moi!

Eh bien non, ils ne savaient pas mieux que moi!

Nous sommes, en tant que mamans, extrêmement exigeantes envers nous-mêmes. Nous voulons si bien faire, nous ne voulons pas nous tromper!

Et si nos décisions et nos actions faisaient en sorte que notre bébé ne se développe pas bien? Ce serait terrible!  Ce serait notre faute!

Alors, nous nous en demandons beaucoup. Nous lisons le Mieux vivre comme si c’était une bible. Les émissions à la Super Nanny et Dre Nadia foisonnent. Parce que nous croyons que nous avons besoin des experts pour savoir quoi faire, nous ne sommes que des petites mamans incompétentes après tout.

Les mères sont des bitchs. Envers elles-mêmes. Elles se jugent durement. Prennent tout personnel. La moindre remarque sur notre façon de materner devient une attaque sur nos compétences maternelles. On se sent souvent nulles, insécures. Démunies. Vulnérables.

Alors, qu’est-ce que les mères font? Elles se bitchent. Elles se rabaissent entre elles pour essayer de remonter leur estime. Elles se prennent pour des spécialistes, des expertes, quitte à faire sentir la maman en face d’elle comme une moins que rien, une ingrate, une indigne.

Bref, elles traitent les autres mamans comme elles se sentent traitées. Elles clament haut et fort : j’ai raison, tu as tort! Je sais ce que tu dois faire pour bien t’occuper de ton enfant, regarde comme je suis une bonne maman! Je dois t’en convaincre pour me convaincre moi-même!

Les mères sont des bitchs. Et tu as raison, Bianca, c’est insupportable pour tout le monde. Celles qui bitchent ont déjà été bitchées. Personne d’entre nous ne l’a jamais fait. Je suis coupable de bitcherie, moi aussi.

Mamans, soyons indulgentes envers nous-mêmes. Faisons-nous assez confiance, aimons-nous assez pour ne pas avoir besoin de rabaisser les autres pour se sentir bonnes et compétentes. Cessons de nous juger si durement.

Soyons solidaires les unes des autres. Soutenons-nous, encourageons-nous. Nous avons besoin de nous respecter. Nous d’abord, toutes les autres mamans ensuite.

Merci, Bianca, pour ce rappel à l’ordre. Je te souhaite bien du bonheur avec ta petite Liv.

4 commentaires:

  1. Ah ! J'aime beaucoup tes articles !
    Je partage ton point de vue, comme souvent ! Malheureusement, nous les femmes, nous ressentons comme une interdiction tacite de laisser libre cours à notre instinct animal... Ce serait pourtant tellement plus simple de s'écouter et d'agir en conséquence. On ne serait plus frustrées, nos enfants non plus, nos relations seraient plus harmonieuses et on cesserait de jeter la pierre pour s'auto convaincre qu'il y a pire ailleurs...
    Encore merci pour tes articles !

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    1. Merci pour tes beaux commentaires, Aurélie! Tu as raison, nous ne nous sentons pas libres d'écouter notre instinct de maman, notre instinct animal. C'est tout un défi de se faire confiance! Même après quatre enfants, je manque encore de confiance en moi, c'est dire comme c'est profond comme malaise...

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  2. Vous savez ce qui m'embête le plus? Les comparaisons que font les gens entre deux enfants. L'amie de ma mère prend un malin plaisir à chaque fois que je la vois à jouer à "ta fille fait-elle ceci, parce que ma petite fille sait déjà faire telle ou telle chose". Non seulement elle réussi à me complexer mais aussi à me remettre en question si ma fille ne fait pas ce qu'elle mentionne. Est-ce que je fais vraiment ce qu'il faut pour le développement de mon enfant?

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    1. C'est tellement vrai que c'est angoissant, les commentaires que nous font certaines personnes! Je déteste moi aussi quand mes enfants se font comparer, entre eux ou avec d'autres enfants. Pourtant, j'admets que je le fais parfois moi même... et que j'arrive à me rendre anxieuse en faisant ça... Même après quatre enfants, je suis toujours aussi inquiète : est-ce que mon enfant est correct? Est-ce que je fais ce qu'il faut? Je suis incorrigible...

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